Highlight Federer Wawrinka 2017

Comment les highlights t’empêchent de bien jouer

Avec le début de Roland Garros, j’aimerai revenir sur un sujet : les highlights ou résumé de match. Je n’ai pas pu regarder la finale de l’US Open en direct. Même si l’affiche était tout à fait intéressante, j’avais mieux à faire un dimanche dans la nuit. Notamment dormir pour pouvoir travailler le lendemain. Alors comme beaucoup d’amateurs de tennis, le lundi matin, je suis allé voir sur les réseaux qui avait gagné. Et quand j’ai eu une pause dans ma journée, j’en ai profité pour regarder un résumé du match, un highlight (littéralement “surligné” les moments importants).

Un résumé embelli

Ma réaction en voyant le résumé : QUEL MATCH !

Wow Ted
Ma réaction devant les coups de l'espace qui sont sortis pendant ce match.

Il y avait des émotions, des retournements de situation, une tension palpable jusqu’au dénouement finale. Mieux que la dernière saison de Game of Throne ! J’étais finalement déçu de ne pas avoir vu le match en entier. Enfin… il dure plus de 4h quand même. Il faut réserver son après-midi.

En regardant un résumé, est-ce que tu as déjà eu l’impression qu’un joueur menait, alors que quand tu regardes le score, il est derrière ? “Je comprends pas, Nadal gagne tous les points que je vois alors qu’il est en train de perdre le match.”

Certes, on a l’habitude de dire que le tennis n’est composé que d’environ 20% de temps de jeu effectif (temps durant lequel la balle est en jeu) et de 80% de temps mort (temps de repos, temps de mise en place entre les points, temps de concentration avant le service, etc). Le résumé que j’ai vu, sur la chaîne YouTube de l’US Open fait près de 40 minutes. Pour un match de 4h, cela veut dire que je n’ai vu qu’un huitième du match. Mais surtout, ça signifie que, comme à la boucherie, on a choisi pour moi les meilleurs morceaux uniquement : 115 points sélectionnés.

Sur ces 115 points, on peut voir :

  • 81 coups gagnants dont 
    • 13 aces
    • 6 smash
  • 34 fautes dont
    • seulement 13 que je vais qualifier de directes (certaines sont à débattre)
    • et une double faute

La quasi-totalité des fautes montrées était des points de jeux ou de set. La double faute est la balle de débreak au début du dernier set.

Une impression faussée

Les highlights ne sont pas faits pour nous donner un récapitulatif objectif du match. Ils sont là pour nous divertir en nous montrant les coups les plus impressionnants. En même temps, qui a envie de voir un résumé de 30 minutes avec des fautes directes sans conséquences majeures sur le score ? Pas grand monde à mon avis. Donc on nous montre des points mémorables avec des coups gagnants dignes des meilleurs joueurs de l’Univers.

Mais la réalité est bien différente. Voici 2 graphiques montrant le rapport de points remportés sur coup gagnant et sur erreur de l’adversaire, chez les hommes et les femmes, en fonction du niveau de jeu :

Graphiques des points gagnants chez les joueurs et joueuses
Graphiques des points gagnants chez les joueurs et joueuses en fonction de leur niveau

J’en profite pour remercier l’équipe de Tennis Analytics qui me permet d’utiliser leurs données. Ils m’ont d’ailleurs donné un lien affilié si tu veux faire analyser tes propres matchs pour découvrir objectivement quelles sont tes forces et faiblesses. Si tu es intéressé, clique sur le lien.

Ces graphiques ont été réalisés à partir de 2,24 millions de points analysés entre 2017 et 2020. Les courbes oranges représentent le pourcentage de points gagnés sur faute adversaire. Les courbes bleues sont le pourcentage de coup gagnant. Le tout en fonction du niveau (on retrouve sur la droite des graphiques le niveau pro avec la WTA et l’ATP). 

Ce qu’il faut comprendre de ces données, c’est qu’en moyenne 75% des points sont gagnés sur une faute de l’adversaire. Seul 1 point sur 4 est remporté sur un coup gagnant.

Les conséquences sur ton jeu

Les 3 quarts des points sont remportés sur une faute adverse. Mais dans les highlights, on nous montre tout le contraire. Et c’est compréhensible : les vidéos résumé te montrent ce qu’il y a eu de plus mémorable dans le match. Il n’a pas pour but de refléter la réalité.

En regardant ces résumés, on peut finir par penser que c’est comme ça qu’on gagne un match : en jouant des coups gagnants, en claquant de gros smashs ou des aces dans les coins. C’est donc le jeu qu’on essaie de pratiquer, un jeu agressif à la recherche de la frappe long de ligne pour déborder ton adversaire ou du passing-shot court croisé. Et c’est à ce moment que tout se complique. Car personne ne peut faire 75% de coups gagnants dans un match. Absolument personne. 

“Même contre un adversaire que je surpasse totalement ?” Oui même dans ce cas. Tu vas certes rentrer plus de coups gagnants mais ton opposant va également faire plus de fautes. La différence du nombre de coups gagnants et des faute de l’adversaire ne sera positive que dans des cas rarissimes. 

Sauf que nous axons nos efforts sur la recherche de toujours plus de coups gagnants. Au contraire, nous devrions tous chercher à maximiser notre régularité (et moi le premier). Se mettre à remettre des balles longues, avec beaucoup de sécurité par rapport au filet ou aux lignes quand on est en difficulté, au lieu de tenter un coup désespéré. Apprendre la patience dans l’échange au lieu d’attaquer toutes les balles y compris quand on est mal placé (et pour ça je conseille la pratique du jeu libre que je décris dans cet article). Attention, être patient ne signifie pas être passif. Tu dois toujours chercher à provoquer la faute chez l’adversaire. Mais pour ça, il faut jouer un coup de plus que lui.

La solution

Voilà ce que je te propose : à partir de maintenant, il va falloir changer ta vision du jeu. Les coups gagnants sont réservés à quelques exceptions (ace, smash, volée de finition quand ton adversaire est débordé). Tes coups d’attaques vont devenir des coups qui ont pour but de provoquer la faute chez ton opposant. Tu n’as pas besoin de jouer à 10 cm de la ligne de couloir si ton adversaire est déjà en retard. En gardant une marge de sécurité, tu t’assures de ne pas faire la faute tout en déplaçant ton adversaire. Et un joueur qui court est un joueur instable. Plus tu vas déplacer correctement ton adversaire, plus il a de chance (ou de risque dans son cas) de faire la faute. 

Quand tu tombes sur un adversaire qui domine l’échange et que tu prends des coups gagnants, ne baisse pas les bras et garde en tête que 3 points sur 4 se jouent sur une faute, pas sur un smash.

Alors, sois patient quand tu es sous pression. Sois actif quand tu domines l’échange pour provoquer la faute ou te donner une occasion simple de faire un coup gagnant. À toi de jouer !

Tu rates trop souvent tes points importants ? Tu te mets la pression à cause du score ?
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